Il est des soirs où la solitude est un peu plus lourde à porter. Des soirs où l'on aimerait bien que quelqu'un vous attende au creux d'un lit tout chaud, pour vous demander d'une voix ensommeillée : "C'était bien ta soirée ?" Des soirs où l'on voudrait avoir une colocataire, tout juste revenue de frasques nocturnes, avec qui pouffer devant une mauvaise émission de télé en mangeant des frites grasses.
Mais puisqu'on est bel et bien seule, il faut trouver un palliatif. Moi, j'aime assez m'abîmer dans la contemplation des toits parisiens. C'est chouette, les toits parisiens. On a l'impression que tout communique, et qu'avec un peu d'audace, on pourrait se transformer en chat errant pour sillonner la ville toute la nuit. Qu'avec un peu de chance, on tomberait sur la lucarne entr'ouverte d'un charmant insomniaque, qui nous montrerait trois accords de guitare en sifflant une bouteille de vodka. Peut-être même qu'on s'aimerait, et peut-être qu'on ferait des enfants. Peut-être pas.
C'est en général à ce moment-là de mes tribulations imaginaires que je remarque une fenêtre allumée pour de vrai, en face dans la cour. Ce n'est pas la même tous les soirs. Peut-être vit-il là, ce musicien de quat' sous. Et espiègle comme il est, il s'amuse à apparaître dans un nouvel appartement à chaque fois. Ou alors est-ce un parent esseulé, seul en charge des mômes pendant que le conjoint est parti en voyage d'affaires, et que j'écouterais bien me raconter son quotidien "fatigant mais tellement, tellement enrichissant". Ou encore une personne âgée, pour qui je pourrais surmonter ma répugnance envers les grand-mères radoteuses, l'espace de quelques heures.
On n'est jamais seul, dans une ville, la nuit. Ces murs qui nous dérobent au regard d'autrui ne nous empêchent pas de sentir qu'on vit ensemble.
Et c'est tant mieux.
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